L’analyse institutionnelle

« Lorsque nous naissons, nous survenons dans un réseau d’institutions qui sont déjà là, avant notre arrivée sur terre: une répartition de la propriété, l’organisation de la famille, de l’Etat. Si nous naissons en France et que nous héritons de la nationalité française, nous vivons dans un système de normes qui ne sera pas celui d’un enfant venant au monde en Allemagne, en Algérie, en Argentine… Il en est de même pour la famille, le milieu ou la classe sociale ou plus généralement pour l’ensemble du système institutionnel dont nous héritons, la religion en particulier, que nous ne choisissons pas , le plus souvent, mais dont nous héritons du fait de naître ici ou là.

Le mouvement des institutionnalistes nous invite à penser nos affiliations aux institutions et nous disent en mot d’ordre: « analysons nos institutions« .

C’est un mouvement d’analyse critique où la personne naît à elle même. D’objet de l’institution, la personne devient sujet. Car selon les institutionnalistes, l’institution nous aliène. Comment peut donc s’opérer ce travail de désaliénation? On quitte souvent une aliénation pour une autre…Cette conquête de compréhension de ce que recouvre l’institution, n’est donc pas une fin mais plutôt un processus.

L’INSTITUTION est définit comme le produit d’une confrontation permanente entre l’INSTITUé ( ce qui est déjà là, ce qui cherche à se maintenir) et l’INSTITUANT ( forces de subversion, de changement)

L’ANALYSE INSTITUTIONNELLE est un mouvement à la fois pratique, puis théorique dont on peut voir les prémisses en France dans les années 1940 sur le terrain de la psychothérapie et de la psychiatrie et qui continue à se développer aujourd’hui dans de nombreuses directions. . En 1969, à la suite des travaux de CASTORIADIS et de LAPASSADE, René LOURAU élabore l’analyse institutionnelle. Ce courant profite du mouvement de mai 1968 pour s’étendre au delà des frontières françaises vers les pays jeunes ou les pays en mouvement: Allemagne, Portugal, Espagne, Italie, Amérique Latine qui deviennent eux-mêmes producteurs de concepts et d’expériences.

Dans les années 1950, des psychiatres et psychologues ( F. TOSQUELLES, J.OURY, F. GUATTARI) réfléchissent sur le groupe et sur l’établissement comme instances essentielles à travailler pour aider les malades mentaux à se construire une transversalité ( ensemble des appartenances institutionnelles d’un sujet ou d’une institution).

Dans les années 1960, ce mouvement de la psychothérapie institutionnelle s’étend :

– à la pédagogie en rencontrant la pédagogie FREINET ( R. FONVIEILLE, F . OURY)

– à la philosophie ( J-P SARTRE, C. CASTORIADIS)

– et à l’intervention psychosociologique et sociologique ( G. LAPASSADE, R. LOURAU)

L’ANALYSE INSTITUTIONNELLE est à la fois une théorie des groupes, des organisations et des institutions mais aussi une méthode d’intervention et d’analyse à l’intérieur des établissements ( éducation, travail social, entreprises…) L’analyse institutionnelle en situation d’intervention est la SOCIOANALYSE.

La SOCIOANALYSE est le dispositif d’analyse de la confrontation entre l’instituant et l’institué. G. LAPASSADE et R. LOURAU ont développé cette forme d’intervention dans le social et l’associatif . Sur le terrain de l’action sociale, signalons tout particulièrement les travaux de D. MARTIN et P. ROYER-RASTOL. « 

Les dispositifs déployés pour mettre en place l’analyse sont appelés les DISPOSITIFS ANALYSEURS:

– Il y a par exemple la PSYCHANALYSE: avec notamment l’inconscient collectif et l’inconscient individuel: Qu’est ce qui nous amène en tant qu’individu à nous intégrer à une institution? qu’est ce qui nous amène à en partir? Une piste développée est notre besoin de sécurité face à notre angoisse de mort. Un besoin de s’inscrire dans une continuité dans l’illusion d’une institution ( famille, entreprise, état…) qui nous survivra ect…

– la PSYCHOSOCIOLOGIE issu de la dynamique des groupes de Kurt LEWIN et de J.L MORENO. (je ferai un autre post sur le sujet)

Enfin Il existe de nombreux modes de travails sur le terrain de l’intervention qui dépendent de la position du chercheur . Une des techniques les plus souvent pratiquée dans le cas de l’intervention interne en France est :

LE JOURNAL INSTITUTIONNEL, outil qui permet de suivre au jour le jour le développement d’un processus d’analyse notamment dans la mise en place d’un « laboratoire d’ethnographie institutionnelle » Par exemple dans le cadre de la mise en place d’une réforme dans une institution comme l’éducation nationale, proposer l’écriture d’un journal institutionnel aux enseignant est un excellent sujet pour un ethnographe. Ou encore dans le cadre d’un travail d’anthropologie institutionnelle, proposer l’outil des « histoires de vie » par le journal autobiographique, comme observation de l’institutionnalisation du sujet. ( Là encore je vais consacrer un post entier à ce sujet du journal car il y a tant à écrire à ce sujet!)

Source: Penser l’institution avec Georges LAPASSADE, Dialogue imaginaire avec les théoriciens du mouvement de l’analyse institutionnelle, Remi HESS

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